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Rue Lekana de et par Sylvie Mombo

Dire que Sylvie Mombo est métisse relève de la simple observation.
Sa peau, ses cheveux, ses traits en témoignent avec grâce.
Mais, au delà de cette apparence qui nous renseigne sur une éventuelle origine africaine plus ou moins lointaine, ce qui frappe c’est le métissage de sa parole, de son corps et de sa voix en narration.
Pour ce spectacle, elle s’est inspirée -avec son accord- du recueil de nouvelles de Patrick-Serge Boutsindi L’Avis des Ancêtres (éditions de l’Harmattan) et également de ses propres légendes familiales. De mère antillaise et de père gabonais, Sylvie est née et a grandi en banlieue parisienne. Elle s’est fabriqué  « son Afrique » à partir de la diaspora et des histoires qu’elle transporte. Son spectacle Rue Lékana est un témoignage fort de cette démarche.

Rue Lékana, raconte le quotidien extraordinaire de cette rue imaginaire quelque part au Congo. Sylvie Mombo déploie une langue précise et fluide, une adresse public chaleureuse et accueillante. Sans aucune « africanité » forcée ou fabriquée, elle évoque avec son accent parisien,  un Congo que la plupart d’entre nous ne connaissons pas. Elle le fait apparaître au fond de la cave du café Les 3 Arts, quelque part dans le 20eme arrondissement de Paris. Et nous y sommes !
Arrivés dans la rue Lékana, les personnages surgissent, commentent et racontent. Ils habitent la parole et le corps de Sylvie Mombo sans exotisme. Ils sont là, tout simplement, tels qu’ils sont dans la vraie vie, car ceux qui sont allés en Afrique reconnaissent l’accent, les expressions, les attitudes, les mimiques très codifiés. Cela amuse d’abord, mais au fils du récit on comprend que derrière ce jeu, et ces dialogues entre personnages, se dessine une peinture à la fois sans complaisance et bienveillante de la société africaine.
La place de la télévision, les problèmes d’électricité, les relations entre voisins, la corruption, les préjugés, l’emprise de la religion chrétienne, les abus de pouvoir, les « crimandort » (qui ne font que critiquer, manger et dormir), les « sapeurs » qui misent tout sur la classe et les vêtements, l’idéalisation et la survalorisation de LA FRANCE … tout cela est au plus proche, au plus juste de la réalité.

La double culture Africaine et Française de Sylvie Mombo nous enrichit parce qu’elle est totalement assumée et libre. Elle ne passe pas d’un masque à un autre, ne saute pas de l’Afrique à la France, non, sa parole porte en permanence l’empreinte de sa double culture. Elle en joue et se moque même, mais toujours avec délicatesse.

Rue Lékana est une sorte de chronique douce-amère de la vie au Congo et plus largement en Afrique noire, portée par une conteuse d’une grande finesse.
http://sylviemombo.com/